Datant du XVe siècle, la tenture de la Dame à la Licorne, serait, selon les chercheurs médiévistes, une allégorie de nos cinq sens, et la révélation d’un ultime, le « sixième », sens du coeur et porte d’accès au monde spirituel.
D’un symbolisme et d’une force expressive rare, la tenture de la dame à la Licorne, exposée au musée de Cluny, à Paris, est considérée comme l’un des chefs d’œuvre de l’art occidental médiéval. Datant du XVe siècle, et probablement tissée en Belgique, elle se décline en six tapisseries, autant de tableaux mettant en scène, sur un somptueux fond bleu nuit, un jardin d’éden fleuri et arboré peuplé d’élégantes dames allant et venant et d’un fabuleux ballet d’animaux en tous genre, lapins, lions, singes, chiens, oiseaux… Et licorne, bien sûr, figure centrale poétique et onirique, dont la présence symbolique anime toutes les tentures.
Tous les sens symbolisés
Au-delà d’une possible interprétation psychanalytique et sexuelle -la licorne étant associée à la pureté et la chasteté et sa corne pouvant évoquer un phallus-, les chercheurs médiévistes, dont Elisabeth Taburet-Delahaye, directrice du musée de Cluny et auteure du livre référence « La dame à la Licorne » (éditions RMN, 2007), ont remis à jour une autre hypothèse, datant des années 20, celle de l’allégorie des cinq sens, chacun représentés dans chaque tapisserie… Et donc, d’un mystérieux et gênant sixième sens, l’œuvre comportant en effet six tableaux ! Dans chacune des cinq tapisseries, les sens sont ainsi symbolisés.
La vue est représentée dans un premier tableau par la licorne contemplant son reflet dans le miroir que lui tend une jeune femme. Puis c’est l’odorat qui est mis en avant dans le détail d’un singe respirant une fleur et le geste d’une gente dame tressant une guirlande. Dans une troisième scène, l’ouïe est incarnée à travers un personnage jouant de l’orgue. Le goût est ensuite exprimé sous les traits d’un lion faisant preuve de gourmandise et d’un singe s’apprêtant à manger un fruit. Quant au toucher, il est symbolisé dans un cinquième tableau par un personnage tenant fermement un étendard et d’une main effleurant la licorne.
« A mon seul désir »
Reste le dernier tableau, le seul explicitement nommé, portant la mention « A mon seul désir ». Par le geste de la dame qui dépose dans un coffret le collier qu’elle porte dans les cinq autres tapisseries, la voici qui renonce aux plaisirs matériels pour se consacrer, au dernier et ultime sixième sens, quintessence des précédents. Un « sens intérieur », qui selon le philosophe Michel Serres, serait le sens par lequel le sujet peut se retourner sur soi.
« A l’époque médiévale, la théorie du sixième sens est celle du sens du cœur. Le cœur étant entendu à la fois dans le sens d’amour humain, y compris charnel, mais aussi dans son sens philosophique. Pour s’ouvrir, ce sens passe par l’ouverture du cœur », explique l’historienne Elisabeth Taburet-Delahaye. Une théorie qui n’est pas sans rappeler celles de certaines traditions orientales (voir article « le coeur, notre cerveau intuitif ? »). Le cœur est considéré ici comme une porte d’accès vers le spirituel, et le « seul désir » du personnage du tableau étant certainement alors celui d’élever sa conscience…
Le Grand Œuvre des alchimistes
Avec tant de mystères et de symboles voilés, certains ont même vu dans la tapisserie de la Dame à la Licorne, une représentation cachée du Grand Œuvre des Alchimistes, expression désignant la fabrication de la fameuse « pierre philosophale », panacée censée guérir de tous les maux et garantir l’immortalité. La tenture, comme toutes les grandes œuvres artistiques, montre ainsi plusieurs chemins et comporte plusieurs messages, dont nous pouvons tous sentir la force et la portée, notamment en ouvrant un peu plus grands nos capteurs intuitifs.
Isabelle Fontaine
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Impressionnant le symbole des croissants de Lune sur la 6ème tentures, tu as vu Isabelle ??
A reblogué ceci sur cristian sabau.
merci
Pour ceux qui souhaitent se procurer une reproduction de la tapisserie « A Mon Seul Désir » la tapisserie la plus connue de la série de la Dame à La Licorne, vous pouvez vous la trouver sur le site http://www.tapisseriesdeflandres.com
Article intéressant qui à une vision différente que l’on trouve sur d’autre sites.
Existe t’il aussi d’autre nom pour ce tableau ? On parle beaucoup de la licorne je trouve.
Très intéressant. Le philosophe Blaise Pascal, au XVIIe siècle, évoque aussi dans la même perspective les « raisons du coeur »: » Le cœur à ses raisons que la raison ne connaît pas. »
Merci pour votre partage !