Synchronicités généalogiques : des indices sur la piste des secrets de famille 

Synchronicités généalogiques : des indices sur la piste des secrets de famille 

Dans les arbres, les répétitions de dates -naissance, mort, mariage-, et ce parfois à plusieurs générations d’intervalle, interpellent. Loin d’être le simple fait du hasard, ces étranges coïncidences, sortes de « synchronicités généalogiques », pourraient être la trace d’un secret de famille ou d’un drame connu mais toujours à vif dans l’inconscient du clan. 

Jeux de regards et expressions de visages riches dans ce portrait de famille semblant avoir été pris entre deux poses officielles. On peut y ressentir de la connivence, de la gène, du non dit, des alliances, des exclusions… Une ambiance pesante qui pourrait évoquer la présence potentielles de sujets difficiles… Image : National Library of Norway (Unsplash)

Un petit neveu né pile à la date anniversaire de mariage de ses grands-parents, une sœur née le même jour que son père, un fils né le même jour que celui du décès d’un de ses grand-pères, deux frères nés le même jour à quelques années de différence etc. En matière de psychogénéalogie ou psychanalyse transgénérationnelle, approche cherchant l’origine de nos souffrances dans des traumas des lignées précédentes, il n’est pas rare de constater des correspondances d’anniversaires -de naissance, de mort, de mariage-, parfois sur plusieurs générations. Ces répétitions font elle même parfois écho à des situations dramatiques qui se reproduisent d’une lignée à une autre, aux mêmes âges, et parfois même alors que ces situations étaient restées secrètes… « L’inconscient familial a bonne mémoire », relève la psychothérapeute Anne Ancelin Schützenberger. Et de préciser : « J’ai dit ne pas croire au hasard… (…) J’ai vu tant de fois ces coïncidences que je parle maintenant de répétitions familiales et de syndrome d’anniversaire ».(1)

Quand les anniversaires pointent vers un même ancêtre

Pour les thérapeutes transgénérationnels, ces coïncidences sont regardées avec attention. Il se pourrait bien qu’elles soient guidées par un sens sous-jacent, comme si le clan, par ces manifestations de « synchronicités généalogiques », cherchait à dire, signifier, montrer quelque chose, indiquer une direction. Ainsi, ce cas d’une famille où un petit-fils naît le même jour que sa grand-mère ; son cousin germain naît le jour du décès de cette même aïeule, ainsi que deux arrière-petit-fils, tous nés à la funeste date. Quant aux enfants de cette aïeule, trois frères et sœurs, ils décèdent tous au cours du même mois… Se trouvant justement être celui de la mort de leur propre mère ! Dans ce clan, une étonnante convergence de dates d’anniversaires, de naissance et de mort, pointe en direction d’une même personne. Voilà qui peut éveiller les soupçons d’un psychogénéalogiste et le faire s’intéresser à l’histoire de l’aïeule, dont l’inconscient familial semble s’évertuer à la rendre, d’une manière ou d’une autre, toujours visible et vivante dans la généalogie, et ce, sur quatre générations…  

« Souvent, la naissance intervient pour rappeler un événement familial important, triste ou gai », avance Anne Ancelin Schüzenberger ; règle que l’on peut agrandir aux autres dates fondatrices de la généalogie, celle du décès et du mariage, qui fonctionnent également comme des curseurs potentiels d’évenements clé, secrets ou pas. Ainsi, dans le cas de cette précédente ancêtre dont la mémoire semble hanter le clan, sa vie avait été marquée par une union forcée à l’âge de 15 ans à l’amant de sa propre mère, un homme tyrannique et incestueux, qui l’avait avortée de force contre son gré, alors enceinte de plusieurs mois.  Tourné en « légende familiale » par certains, -c’est-à-dire dénié-, et inconnu pour d’autres membres du clan, ce secret avait été « encrypté » à l’intérieur de l’aïeule. Non parlé, non pleuré et surtout non réparé, l’acte meurtrier étant resté impuni, le deuil de cet enfant à naître n’avait pu être fait, et continuait de faire « fantôme » dans la famille, impliquant potentiellement diverses souffrances, conflits psychique, mal-être, troubles, incapacités chez des descendants, éventuellement sur plusieurs générations. L’auteure Elisabeth Horowitz, qui parle « d’horloge généalogique » inconsciente dans les familles, estime de son côté que ces coïncidences de dates, qui ne relèvent en rien du hasard selon elle, seraient des répétitions correspondant à des réparations, « des processus de compensation »(2), lesquels, comme dans cet exemple, visant à soulager un membre de la famille victime d’une injustice.

Une source intarrissable de renseignements

Pour le Dr Salomon Sellam, à l’origine du concept de « Syndrome du gisant », certains membres dans les lignées seraient ainsi, à leur insu, les porteurs morbides -tels des gisants, ces statues funéraires représentant des défunts allongés- de deuils non faits en lien avec une mort injustifiée et injustifiable. Il a ainsi développé une approche basée sur une compréhension d’une mécanique inconsciente familiale autour des dates, de naissance, de conception et celle du « Point G » (pour Gisant), calculée en enlevant neuf mois à la date de naissance d’un individu. « Dans le transgénérationnel, l’étude spécifique des dates est l’un des moyens les plus efficaces pour démasquer une certaine dynamique de l’inconscient circulant au sein de notre clan. Elles représentent une source intarissable de renseignements cachés à notre propre conscience »(3), estime le spécialiste, qui rappelle que la probabilité d’une coïncidence de date anniversaire exacte entre deux personnes est infime, de l’ordre de 0,2%. Et de dérouler l’histoire de « Papillon », personne souffrant de ne pas pouvoir déployer ses ailes dans sa vie. Une étude de son arbre fit apparaitre une succession de dates clé et répétitions de prénoms, qui pointaient toutes en direction de son grand père maternel mort d’une maladie inexpliquée au retour de la guerre. L’événement, bien que connu de tous, continuait de hanter la généalogie, le deuil n’ayant pu être fait par les générations précédentes, et en particulier par sa propre mère. 

Salomon Sellam indique également que, dans les fratries, les naissances de différents enfants à une date identique, mais à plusieurs années d’intervalles, est un indicateur probable de drames restés à vif ou de secret de famille concernant un deuil « injustifié et injustifiable ». L’inconscient familial fonctionnerait dans ce cas en mode « roue de secours », c’est-à-dire de faire programmer plusieurs enfants au cas où l’un d’eux disparaitrait.  A noter que les correspondances de dates sont parfois exactes, au jour près, mais qu’elles fonctionnent aussi à quelques jours de distance, jusqu’à une semaine avant/après autour de la date clé, voire sur un même mois, ou encore aussi en miroir. Le spécialiste transgénérationnel mentionne ainsi le cas d’une dame, « enfant de remplacement » née après deux sœurs jumelles mortes en bas âge un 8/10, elles-mêmes nées un 10/8…  

Syndrome anniversaire

Ces échos familiaux se retrouvent aussi dans la répétition synchronistique de drames aux mêmes âges dans la généalogie. Ce phénomène, appelé « syndrome anniversaire » par Anne Ancelin Schützenberger, est illustré par le cas d’une enfant qui se retrouva, à l’âge de 8 ans, empalée sur un pieu en jouant sur un terrain vague. Elle eu la vie sauve de manière très chanceuse, mais son hymen fut défloré. Ce drame étonnant délia la parole de sa propre grand-mère qui révéla avoir subi un terrible viol à ses huit ans, jusque-là gardé secret. Ou encore l’histoire de cet homme qui, à 32 ans, oublia de s’attacher en deltaplane et se retrouva handicapé à vie, en fauteuil roulant. Il semblait qu’il était en loyauté familiale inconsciente avec son propre père, qui, à 32 ans, oublia d’attacher un creuset en fonte dans l’atelier où il travaillait et s’en trouva handicapé à vie, également en fauteuil roulant. Dans ce dernier exemple, il est important de noter que le drame, connu de tous, semblait cependant être toujours actif dans la généalogie, et devant être inconsciemment réparé par la répétition de type “je partage ta souffrance, je me sacrifie comme toi tu l’as été”.  

Porter un regard curieux sur son arbre généalogique, attentif aux répétitions singulières, est parfois un moyen de dénouer les fils d’un mal être ou de difficultés répétitives inexplicables : fausses couche, séparations, faillites, dépressions ou même des troubles comme l’anorexie… Une chose est sûre, dans les familles, les traumas, secrets ou pas, mais toujours à vif dans les âmes, se transmettent d’inconscient à inconscient. Françoise Dolto exprimait ainsi que selon elle « dans les familles, les enfants savent toujours tout, surtout ce que l’on cache»(4). Si la récente discipline de l’épigénétique semble apporter une explication rationnelle à ce phénomène, avec une possible transmission des traumas à travers les gênes, il n’en est pas moins agissant, et ce, en s’amplifiant au fil du temps.

De indicible à innommable puis impensable

Ainsi, Serge Tisseron, à la suite des fondateurs de la psychogénéalogie, note qu’à la première génération, celle qui vit le traumatisme et scelle le secret de famille, le sujet est « indicible ». A la génération suivante, les événements sont ressentis mais sont « innommables », et ne peuvent faire l’objet d’aucune représentation verbale. A la troisième génération, le sujet devient « impensable » et peut donner lieu à des symptômes inexpliqués, que l’on ne peut relier à rien (5)… Se pencher sur son arbre, en repérant les éventuelles coïncidences de dates anniversaire dans la généalogie, peut constituer un fil à délier pour identifier -avec d’autres indices comme les prénoms, les métiers, les drames de vie- certains contrats et fidélités familiales inconscientes. Ces derniers peuvent être de véritables « tombeaux ouverts » dans lesquels nous gisons, « à l’insu de notre plein gré », tentant inconsciemment l’impossible de réparer des souffrances familiales, et dépensant beaucoup d’énergie psychique pour cela -énergie non disponible alors pour se réaliser. « Les morts sont invisibles, mais ils ne sont pas absents »(6), rappelait Françoise Dolto, citant ainsi St Augustin. « Tout ce qui n’est pas dit se répète », rappelle de son côté le psychanalyste Bruno Clavier(7). Face au poids transgénérationnel de ces cadavres bien planqués dans les placards, mais pourtant omniprésents, apporter du visible -de la conscience- grâce à un travail transgénérationnel autorise bien des libérations aussi bien personnelles que familiales. 

Isabelle Fontaine 

(1) Aïe mes aïeux, Anne Ancelin Schützenberger, éditions Desclée de Brouwer
(2) Mon corps généalogique, Elisabeth Horowitz, GuyTrédaniel éditeur
(3) Le Syndrome du Gisant, Salomon Sellam, éditions Berangel
(4) Transformez votre vie avec les synchronicités, Isabelle Fontaine, Eyrolles
(5) Les secrets de famille, Serge Tisseron, Que sais je PUF
(6) Cité par Anne Ancelin Schützenberger dans Aïe mes aïeux
(7) Les Fantômes familiaux, Bruno Clavier, Payot.

Psychopraticienne en APO (Analyse Psycho-Organique) et en psychanalyse transgénérationnelle -ou psychogénéalogie-, Isabelle Fontaine a publié aux éditions Eyrolles Libérez la voix de votre intuition et Transformez votre vie avec les synchronicités. Elle vous accompagne en processus thérapeutique dans son cabinet à Montreuil ou en ligne, et anime des stages de développement personnel en intuition et sur le yi king. [email protected]

A propos de l'auteur

Histoire d'intuition - Isabelle Fontaine

Journaliste pendant 20 ans spécialisée en bien-être et en santé naturelle, Isabelle Fontaine a publié "Transformez votre vie avec les synchronicités" et "Libérez la Voix de Votre Intuition" (Eyrolles). Passionnée par le sixième sens, la synchronicité -le phénomène de coïncidences signifiantes-, la symbolique, la psychologie, les spiritualités, elle anime le blog Histoire d’Intuition. Praticienne en Analyse Psycho-Organique (APO) et en Psychanalyqe transgénérationnelle, elle accompagne sur le chemin de la connaissance de soi et du changement intérieur. Elle organise des stages de développement personnel sur l'intuition et le Yi King.

Laisser une réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

oeuvre Magritte pop-up newsletter

Allez à la rencontre de votre intuition

 

Découvrez des articles pour développer votre intuition.

Ainsi que les dates des stages, événements à venir et sortie de livre.

Rejoignez dès maintenant mes 2 000 autres abonnés.

Merci pour votre inscription, on se retrouve très vite dans votre boîte mail.