Romancière prolifique, auteure d’une trentaine d’ouvrages inspirés de sa Bretagne natale et de l’Inde, Irène Frain entretient avec l’intuition un rapport intime et créatif. Voici deux histoires d’intuition inspirantes ayant marqué son travail de romancière.
En novembre 2012 la romancière Irène Frain m’accordait un long entretien sur l’intuition, publié dans mon livre « Développez votre intuition pour prendre de meilleures décisions », (éditions Leducs). Impossible à l’époque, pour une question de place, de rendre compte du détail de cet échange particulièrement riche. Elle y partageait non seulement sa vision de l’intuition, mais aussi des anecdotes personnelles, dont deux portaient sur son travail d’écriture, et sur le lien entre imagination et création. Les voici…
– Le Nabab, l’intuition, et les diamants jetés par la fenêtre
Alors qu’Irène Frain clôt l’écriture de son roman le « Nabab », son éditeur lui demande de rajouter à la fin une partie sur le retour du personnage principal en Bretagne, sa terre natale. Elle écrit alors une soixantaine de pages dans lesquelles elle invente que la fille du héros, folle, est mise sous tutelle. Depuis la demeure où elle est cachée, celle-ci jette de désespoir des diamants par la fenêtre, disparus dans l’océan. L’éditeur choisit finalement de ne garder que dix pages de ce rajout, et ce passage précis n’y figure pas. Quelle ne fut la surprise de l’écrivain, après la sortie du roman, de recevoir une lettre de l’actuel propriétaire de la maison en Bretagne dans lequel son personnage avait vécu. Il lui disait, « Votre roman est très bien, mais sachez qu’il manque des informations. Voici la vraie histoire, je vous envoie des documents qui vous éclairent un peu plus sur la fille de Madec. »… Et dans ces documents était justement relaté un épisode où celle-ci jetait des diamants par la fenêtre ! Irène Frain n’avait jamais eu accès à ces informations qui d’ailleurs étaient restés cachées au fond d’un tiroir pendant des années….
– Les Naufragés de l’île Tromelin, le rêve prémonitoire et la maison du temps
En pleine préparation du roman Les Naufragés de l’île Tromelin, Irène Frain décide de se rendre sur place pour faire des repérages. Sur cet îlot de l’Océan Indien ont été abandonnés au 17e siècle soixante esclaves malgaches pendant quatorze ans. Seuls quelques femmes et un enfant ont survécu. Irène Frain passe quatre jours sur cet îlot de un kilomètre carré, cerné par les déferlantes, en état de survie. Tromelin rend fou dit-elle. Alors qu’elle tombe de fatigue une après-midi, elle s’endort et fait un rêve. Elle voit une maison en pierres, avec une fenêtre et un rai de lumière rentrant dans la maison. Elle voit alors quelque chose d’écrit -et ce pour la première fois dans un de ses rêves- la phrase : « La maison, c’est le temps ». Au réveil, elle note le rêve car il l’avait intriguée, et fait un croquis. De retour à Paris, Irène Frain déniche dans une bibliothèque une vieille thèse dactylographiée sur la notion de temps dans la tradition malgache. Cela l’intéresse pour son roman. En le feuilletant, surprise ! Elle tombe sur un croquis ressemblant trait pour trait au sien, expliquant que, pour les malgaches, le décompte du temps se fait par l’entrée d’un rayon de soleil dans la maison… Irène Frain s’interroge. Certes, elle a déjà voyagé à Madagascar. Avait-elle vu quelque chose là-bas sans s’en souvenir ? Une chose est sûre en tout cas, la romancière se sentait en état de survie sur cette île. Etat qui pour elle est intimement lié aux capacités intuitives de l’homme…
Isabelle Fontaine
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